Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monsieur, je me remectrai à ce que messieurs d’Ourches et de
2Chastelart vous auront escritz touchant le succès de
3l’affère pour lequel est icy venu le procureur Michallon. Leurs
4majestés ont monstré qu’elles ont voz services en toute bonne
5souvenance. S’il plaist à Dieu, elles vous reserveront ceste bonne
6volunté en occasion qui ne nous soit pas si luctueuse et
7de ce que je vois y pourrai savoir, je me y employerai comme
8pour l’un des seigneurs de ce royaulme que j’honnore le plus.
9Je m’asseure aussi, Monsieur, que vous aurés esté adverty
10de la poursuicte que font icy les deputés de ceux de la
11nouvelle religion de vostre gouvernement ; vous ne y aurés pas
12esté oublyé. J’en ay dict ce que m’a semblé, premièrement au
13conseil depuis ausdits deputez, exepté à monsieur de Saint-
14Romain que je n’ay pas veu ce jourd’huy. J’en ay longuement
15parlé avecques la royne et n’ay rien obmis de ce que
16j’estime que porte le devoir. Sa majesté a grande opinion
17de vos louables actions. Je desire, Monsieur, qu’il vous plaise
18leur en escrire. Ces gens disent que depuis la paix vous
19avés entièrement changé de naturel et que vous vous
20monstrés partial, ne permectant qu’ilz puyssent jouir de
21l’edict de la paix. Je m’asseure Monsieur, que vous userés
22de ce temperament que pour leur mesdisance vous ne vous
23lascherés à chose qui prejudicie au service du roy ou puisse
24instament offenser les catholiques. Aussi, Monsieur, suys-je
25bien d’avis que vous les esclarcissiés tellement de votre droicte
26intention à l’observation dudit edict et conservation de la
27paix et unyon que sur vous fondemens, nous qui sommes
28esloignés de vous, puyssions clorre la bo[u]che à ceux qui
29[v°] vouldroient calumnier voz actions. J’adjoupterai
30une chose que je scai n’estre aulcunement necessaire,
31c’est que par votre aquanimité accoustumée
32vous ne permectiez que ceux qui notoirement vous
33ont porté trop peu de respect se puyssent vanter
34d’avoir peu alterer aulcune chose en la doulceur et
35bonté de votre naturel. Je m’asseure que vous
36serés ayse de les avoir renduz meilleurs par justice
37et par patience. Des affères de par-deçà, je ne
38scai que vous escrire, si ce n’est que nous sommes toutz
39en peine de l’avenir, nous vivons en suspens, Dieu s’il
40luy plaist permectra que le meilleur conseil soit suyvi.
41Sur ce, je fay fin, me recommandant bien humblement
42à votre bonne grace et de madame, votre bonne
43partie, priant Dieu de vous donner,
44Monsieur en parfaicte santé et toute prospérité,
45très longue vie. C’est de Paris, le VIe jour
46d’aoust 1572.
47Vostre bien humble et
48affectionné serviteur
49Bellievre